49 femmes qui font la difference (PDF)




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3

Message du président
du Rotary Club de Vacoas

L

e Rotary International
est la première organisation de clubs service
au monde. Il rassemble
plus de 32 000 clubs dans près
de 170 pays et 1,2 million de
membres à travers le monde.
Sa devise est « Servir d’abord »
et son objectif est de rassembler
les hommes d’affaires en vue de
fournir des services d’assistance
humanitaire, d’encourager le
respect de normes élevées en
matière d’éthique dans tous les
secteurs et d’aider à promouvoir
la paix dans le monde.
Pour les Rotariens, la race, la
couleur, la croyance, la religion,
le sexe et les préférences politiques d’une personne n’aucune
importance. Ils sont d’ailleurs
connus pour leur esprit de
camaraderie et leur dévouement
envers les démunis.
Les Rotariens appliquent le critère des quatre questions
du club Rotary et voient des opportunités là où d’autres
voient des obstacles. Globalement, les clubs Rotary ont
cinq domaines d’action : Action intérieure, Action professionnelle, Action d’intérêt public, Action internationale et
Action jeunes générations.
Les activités des Rotariens découlent des axes stratégiques
de l’association, c’est-à-dire la paix ou la prévention/
résolution des conflits ; la prévention et le traitement des
maladies ; l’eau et l’assainissement ; la santé de la mère et
de l’enfant ; l’alphabétisation et l’éducation de base et ; le
développement économique et local.
Il faut savoir que de 1905 jusqu’aux années 80, les femmes
n’étaient pas admises comme membres dans les clubs
Rotary. Cela, bien que les épouses des Rotariens étaient
membres de l’Inner Wheel et participaient activement dans
tous les domaines de service.

Néanmoins, depuis 1986,
Rotary International prône
l’égalité des genres. L’organisme
est d’ailleurs allé jusqu’à modifier sa devise. Ainsi, « Celui qui
sert le mieux profite le plus »
est devenue « Qui sert le mieux
profite le plus ». Cela illustre
parfaitement l’évolution vers
l’acceptation des femmes au
sein du Rotary.
Le Rotary Club de Vacoas a
obtenu sa Charte il y a 25 ans.
Ses 28 membres se réunissent
chaque quinzaine, le mardi
après-midi, au Gymkhana
Club, à Vacoas. Parmi, on
compte 7 femmes. Ce n’est pas
suffisant pour un club qui croit
autant dans l’égalité des genres.
Nous comptons recruter davantage de membres féminins dans
un proche avenir.
Pour commémorer ses 25 années d’existence, ainsi que les 49
d’Indépendance de la République de Maurice, le Rotary Club de Vacoas a sponsorisé
ce magazine-souvenir, qui se veut être un hommage aux
femmes de toutes les couleurs, communautés et classes sociales qui ont contribué au développement de notre pays.
Chacune, à sa façon, a aidé à mettre le pays sur la voie
du progrès. Et sans elles, le pays n’aurait jamais atteint
son niveau de développement actuel. Mais il est évident
qu’aucune publication ne pourra rendre suffisamment
hommage à toutes les Mauriciennes. Mais à travers celles
qui figurent dans ce magazine-souvenir, c’est à ces centaines
de milliers de femmes que nous disons « Merci » d’avoir
aidé le pays.
Vive le Rotary ! Vive l’égalité des genres !

C.S. Ramdaursingh
Président 2016-2017

Rotary Club de Vacoas

4

Une belle aventure
humaine avant tout

L

e magazine-souvenir que
vous tenez entre vos mains est
né d’une idée folle un beau
jour de décembre 2016 lors
d’une discussion avec le président du
Rotary Club de Vacoas, le Dr Praveen
Ramdaursingh. Mais l’aventure humaine fut très enrichissante. Nous
avons rencontré des femmes formidables, admirables, courageuses,
déterminées et humbles. Certaines
ont eu un parcours étonnant, alors
que d’autres ont fait preuve de bravoure et d’énergie exceptionnelles.
Nous avons été émus, bouleversés
par l’histoire de quelques-unes.
Mais attention ! Ce magazinesouvenir n’a pas pour objectif
d’ériger quiconque en super héroïne.
D’ailleurs, aucune de celles qui ont
été interviewées ne se voit ainsi. Ce
sont uniquement des personnes
qui se sont frayé leur chemin en ce
bas monde, qui ont rêvé de mieux
pour elles-mêmes et leurs proches
et/ou qui se sont dévouées pour
leur famille… non pas dans l’espoir
qu’une quelconque récompense ou
reconnaissance, mais parce qu’elles
estimaient que c’était tout simplement leur devoir de mère, d’épouse,
de soeur ou de patriote.
Évidemment, aucune publication
ne pourra rendre justice à toutes ces
Mauriciennes qui, à leur façon et au
fil des ans, ont mis leurs efforts et
leur courage au service de leur pays,
la société et l’humanité. Ce magazine-souvenir n’est qu’un hommage

à leur dévouement et à leur contri- la volonté et la persévérance finissent
bution à l’économie, mais aussi à la toujours par payer.
vie (au sens large) du pays. Leur apport, à notre humble avis, n’a pas été
Nous ne prétendons pas une seule
suffisamment souligné.
seconde que les 49 portraits qui se
trouvent dans ce magazine-souvenir
Pourquoi 49 et non 50, qui est un constituent un échantillon représenchiffre rond ? La réponse est sim- tatif. Bien d’autres femmes auraient
ple. En cette année 2017, Maurice pu (auraient dû) y figurer. Il y en a
célèbre ses 49 ans d’indépendance certaines auxquelles nous n’avons
et ses 25 ans de République. Certes, pas pensé, d’autres qui n’étaient pas
nous aurions pu nous arrêter à 25. disponibles… Puis, nous n’avions
Cela aurait été plus simple et plus prévu que 49 portraits.
pratique. Mais nous voulions avoir
le maximum de portraits dans ce
Nous remercions toutes celles qui
magazine-souvenir.
ont pris le temps de nous rencontrer et de répondre à nos questions.
Aussi, nous estimions qu’il était Merci aussi au Dr Ramdaursingh et
possible d’atteindre le chiffre de au Rotary Club de Vacoas pour avoir
49… même s’il faut reconnaître rendu ce magazine-souvenir possible.
qu’au départ, la tâche paraissait
énorme. Mais, comme vous le verrez
en lisant le parcours de plusieurs de
Radha Rangasamy/
« Ces femmes qui font la différence »,
Michael Jean Louis

6

7
Ameenah Gurib-Fakim

Briser le
plafond
de verre
Elle a fait l’histoire en devenant la
première femme à occuper la présidence de la République de Maurice.
Mais Ameenah Gurib-Fakim est aussi une
scientifique renommée, qui fait la fierté
du pays.

S

elon l’écrivaine Ananda
Devi, les Mauriciens
n’auraient pas vraiment
conscience du niveau
de reconnaissance dont jouit
Ameenah Gurib-Fakim sur
le plan international. Elle
expliquait qu’un jour, dans
le long couloir où trône
d’immenses portraits de
femmes ayant reçu le prix
de la Fondation l’OréalUNESCO pour leur contribution à un domaine
scientifique, elle a vu
la photo d’Ameenah
Gurib-Fakim. Sa fierté
a été immense de constater qu’une de ces
femmes de science
est Mauricienne.
La scientifique
en question est
née le 17 octobre 1959 à
Surinam et a
grandi à Plaine
Magnien.Sonpère
Hassenjee Gurib a
terminé sa carrière

comme inspecteur des écoles primaires,
alors que sa mère, Firdaus Durgauhee,
est femme au foyer. «J’ai un jeune frère.
Et nous avons eu une enfance extrêmement
heureuse, entourés de parents très attentionnés», explique-t-elle.

a publié plusieurs livres et articles dans
le domaine des plantes médicinales de
Maurice et de la région océan Indien.
Pour elle, le pays n’a pas suffisamment
exploité le potentiel des plantes. «C’est
la biodiversité (faune et flore) qui détermine la survie de l’homme sur cette planète.
Nous ne réalisons pas à quel point nous
dépendons des plantes pour vivre. Elles
nous fournissent tous les éléments dont
nous avons besoin : oxygène, médicaments,
nourriture, fibre pour nos vêtements... Au
moins 60% de nos médicaments vendus
en officine, proviennent de source naturelle
notamment des plantes.»

Ameenah Gurib a fréquenté l’école
primaire St. Patrick RCA à Plaine Magnien avant de rejoindre le Couvent de
Lorette de Mahébourg, puis celui de
Quatre-Bornes. Elle se passionne pour
ce qu’on appelle les matières scientifiques. «Au Couvent de Lorette de Mahébourg, j’ai eu le grand privilège d’avoir eu
des professeurs très motivés, qui avaient le
don et le talent de rendre la science, plus
Si, souligne-t-elle, la canne à sucre, le
particulièrement la chimie, très vivante. thé et le tabac, entre autres, ont largeJ’ai trouvé dans la chimie les réponses à mes ment contribué au développement
nombreuses questions», souligne-t-elle. économique de notre pays, une industrie sur les plantes
La suite de sa carrière
médicinales est
«C’est un message
était alors toute tracée.
possible. «C’est
Elle met le cap sur important adressé aux jeunes d’ailleurs parmi les
l’université de Surrey,
objectifs du CIDP
filles de Maurice. Il est
en Grande-Bretagne, possible d’accéder à la plus qui vise à propour des études en
duire des phytochimie. Elle décro- haute fonction de notre pays médicaments ou
che son degré. C’est à sans avoir eu nécessairement alors à découvrir
un parcours politique»
l’université d’Exeter
des ingrédients
qu’elle fait son doctorat
novateurs qui seren chimie organique.
viraient dans le
«La chimie organique tourne autour du domaine médical, le cosmétique, la parCarbone, substance qui est à la base même fumerie ou dans le secteur de la nutrition.»
de la vie. Les humains, tout comme les animaux, sont constitués d’eau et de carbone !
En 2015, la scientifique est appelée
J’ai eu une bourse de l’Université d’Exeter à servir le pays à un poste encore plus
en Angleterre pour travailler sur la prestigieux, celui de président de la Résynthèse des peptides (partie des protéines). publique. Elle est la première personne
Encore une fois, j’ai suivi mon cœur et ma apolitique à être nommée à cette foncpassion», précise-t-elle.
tion. «J’essaie d’apporter mes compétences à l’avancement de notre pays tout
De retour à Maurice, elle intègre la en améliorant sa visibilité.» Le fait d’être
faculté d’Agriculture de l’Université de la première femme à accéder à ce poste
Maurice en 1987. «J’ai ensuite rejoint la ajoute-t-il une pression supplémentaire
faculté des Sciences à sa création en 1989. à la charge ? «Je ne le crois pas. Je pense, en
J’ai gravi les échelons pour finir comme la revanche, que c’est un message important
première femme professeur à l’Université adressé aux jeunes filles de Maurice. Il
de Maurice. Entre 2004-2010, j’ai servi est possible d’accéder à la plus haute
l’institution comme doyen de la faculté des fonction de notre pays sans avoir eu
Sciences et ensuite pro-vice chancelière. Je nécessairement un parcours polime suis retirée en 2010 quand j’ai créé ma tique».
société, le Centre de phytothérapie et de
recherche (CEPHYR), qui est devenu, en
Elle explique que depuis tou2015, le CIDP Recherche et Innovation», jours, l’économie mauricienne
explique-t-elle.
bénéficie beaucoup de la contribution féminine et ce depuis
Entretemps, Ameenah Gurib-Fakim toujours. «Maurice doit davantage

tirer profit des compétences féminines pour
avancer. Permettez-moi de faire référence
au football qui comme vous le savez est un
sport avant tout masculin. Est-ce qu’une
équipe peut s’attendre à gagner un match
si elle ses passait de 52% de son effectif ?»
En cette année, où le pays célèbre ses
49 ans d’Indépendance et ses 25 ans de
République, elle demande à la population «de continuer à consolider notre République». Aux Mauriciennes, elle dit
de «continuer à oser, à prendre des risques,
à croire en elles et à ne jamais baisser les
bras». Enfin, aux jeunes, elle lance le
message suivant : «Développez une discipline et une culture de travail et surtout,
continuez à rêver grand!»

8

9

Manjula Veerapen

À force de volonté
Elle n’est pas née avec
une cuillère
d’argent dans
la bouche.
Enfant, elle
a su ce que
c’est que
de ne pas
manger
à sa
faim ou
encore
d’habiter
une maison
sans fenêtres. Mais sa
persévérance
a fini par payer.
Elle est aujourd’hui
à la tête de sa propre
entreprise, le Bazaar
Veerapen.

D

es yeux pétillants, un visage
tout rond qui reflète sa bonté, un sourire généreux…
Manjula Veerapen, 45 ans,
dégage autour d’elle une énergie positive, peu importe dans quel milieu elle
se trouve. L’enthousiasme a toujours été
son moteur dans tout ce qu’elle entreprend. Toujours afficher l’optimisme!
Telle est sa devise. Pour elle, c’est sa
positivité qui a fait d’elle une femme
d’affaires à succès. «Pour moi, le mot
impossible n’existe pas. Tout est possible du
moment qu’on y met du sien. Il suffit d’y
croire et de persévérer. Le dur labeur finit
toujours par payer», affirme-t-elle.
Se battre pour sa survie : Manjula a appris à le faire dès l’enfance. Elle est devenue orpheline de père à 11 ans. Il venait
tout juste de démarrer la construction
de la maison familiale à Triolet. «Ma
mère, ma sœur aînée et moi avons dû vivre
dans une maison incomplète, sans fenêtres
et avec une feuille de tôle qui servait de
porte. Ce sont des sacs de jute qui faisaient
office de rideaux. Du coup, ma mère a dû
aller travailler dans une usine pour subvenir à nos besoins alors qu’elle n’avait jamais
travaillé de sa vie. Nous mangions ce que
nous avions sous la main. Des fois, c’était
du riz fricassé avec du piment sec et des
oignons», relate-t-elle.
Leur mère arrivant à peine à joindre les deux bouts, Manjula et sa sœur
Nianum sont contraintes de quitter le
collège pour chercher du boulot. Elles
«Pour moi, le mot
impossible n’existe pas.
Tout est possible du moment
qu’on y met du sien. Il suffit
d’y croire et de persévérer»

«Il nous arrivait de passer
la nuit dans notre camion
à l’époque où nous proposions
un service de transport à une
firme pour la construction
d’un grand bâtiment
commercial à Grand-Baie»

l’enseigne ‘Bazaar Veerapen’, toujours à
Grand Baie.

À force de persévérance, les Veerapen
parviennent à décrocher des contrats
pour fournir des légumes à plusieurs
hôtels. Manjula est reconnaissante à
Jean-Michel Pitot, CEO du groupe
hôtelier Attitude, qui leur a donné un
coup de pouce. «Il a beaucoup apprécié
notre débrouillardise et notre sens du dur
labeur. Il nous a fait confiance au tout
travaillent d’abord dans des magasins début et encore aujourd’hui», précise
pour aider leur mère à compléter la cette habitante de Pointe aux Canconstruction de leur maison. Manjula onniers.
travaillait dans un magasin touristique
lorsqu’elle rencontre celui qui allait deBazaar Veerapen s’installera fivenir son époux. Il s’agit de Mougum, nalement à Triolet. Chaque anun marchand de légumes. Après leur née, l’entreprise est récompensée
mariage, elle cessera de travailler pour pour la qualité de ses services
s’occuper de sa maison. Elle accouche par l’Association des chefs
de son premier enfant à 22 ans.
mauriciens. Ce sont l’époux et
le fils de Manjula qui vont se
C’est Koomaren Chetty, un ami de procurer des légumes dans la
la famille, qui la motive à épauler son nuit dans la capitale. Quant à
époux dans son business de vente de la femme d’affaires et sa fille
légumes. «Nous avons commencé à ven- aînée, elles sont postées dès
dre des légumes sous un arbre. Ce sont mes six heures du matin au Bazaar
beaux-parents qui étaient à la base de ce pour préparer les légumes et
business. Mon époux et moi avons pris la fruits destinés aux hôtels.
relève. Ce n’était guère évident de dépendre Et c’est le couple Veerapen
uniquement de ce commerce. Parallèle- et leur fils qui en assurent la
ment, nous avons dû cumuler toutes sortes distribution au quotidien.
de petits boulots», soutient cette mère de Ils bossent six jours sur sept,
quatre enfants.
au même rythme. «Je suis
contente d’avoir pu inculquer à
Le couple aura tout fait : ramassage mes enfants l’importance du dur
d’ordures, nettoyage des cours des labeur. Ils ont aussi appris à éconoparticuliers et des hôtels, transport de miser de l’argent. Ce n’est parce que
matériaux de construction... «Il nous ar- nous avons maintenant les moyens
rivait de passer la nuit dans notre camion à que nous vivons dans l’excès», lance
l’époque où nous proposions un service de la mère de famille.
transport à une firme pour la construction
d’un grand bâtiment commercial à GrandC’est la raison pour laquelle
Baie», poursuit-elle. Pour Manjula, Manjula demande aux
on ne peut avoir honte de son boulot, femmes qui veulent démardu moment que l’on gagne sa vie rer leur propre entreprise
honnêtement.
de «foncer et ne pas se
laisser abattre». Car,
Des nuits blanches, le couple Veerapen ajoute-t-elle, «rien ne
en a connues ! Outre les menus travaux s’acquiert sans dur lade la journée et la vente des légumes, beur et sacrifices». La
il devait se rendre tous les soirs dans la petite fille chétive qui
capitale pour s’approvisionner à la vente vivait dans une modà l’encan. Les sacrifices de Mougum et este demeure à Triolet
Manjula auront finalement été payants a fait du chemin. Elle est
car leur échoppe s’est transformée en aujourd’hui une redoutable
un petit marché de légumes, portant femme d’affaires !

10

11
rien en retour. J’ai toujours eu de la
compassion pour ceux qui souffrent», faitelle ressortir.
Ce qui interpelle le plus la travailleuse sociale, c’est l’hypocrisie de
certains politiciens face aux fléaux
sociaux. «Le problème des drogues, par
exemple, n’est pas suffisamment adressé»,
dit-elle. Anishta s’inquiète aussi du fait
que le fossé entre riches et pauvres
s’accroit. Sans compter que la classe
moyenne s’appauvrit.

Anishta Babooram-Seeruttun

Le social dans la peau
Anishta Babooram-Seeruttun est
surtout connue pour ses prises
de position suscitant la polémique. La présidente de l’ONG
The Rising, également membre
de la Commission des Droits de
l’Homme, n’a qu’un seul objectif :
défendre tous ceux qui souffrent.
Quitte à froisser !

O

riginaire de L’Escalier, Anishta Babooram-Seeruttun
figure parmi ces femmes qui
ne sont pas nées avec une

«Ce sont les circonstances de la vie qui
m’ont poussée à entamer des études de
droit. C’était mon rêve de devenir avocate.
À Maurice, je n’ai pas réussi à l’examen du
barreau. Je suis donc partie en Angleterre
pour y arriver. Mais faute d’argent, je n’ai
pu le faire. J’ai donc choisi de poursuivre
mes études et décrocher une maîtrise en
droit commercial et international»,
Elle a fréquenté l’école primaire raconte-t-elle.
Sir Claude Noël Govt School de
l’Escalier et, par la suite, le Couvent de
La vie d’Anishta Babooram-SeerutLorette de Mahébourg. Elle a fait ses tun n’a jamais été un fleuve tranquille.
études en droit à l’Université de Mau- En sus du décès de son père, elle a aussi
rice avant de mettre le cap sur Londres, été marquée par la maladie de sa mère.
à la London Metropolitan University, «Le moment le plus douloureux de ma
pour les compléter.
vie a été lorsque j’ai appris que ma mère
cuillère d’argent dans la bouche. Elle a
perdu son père alors qu’elle n’avait que
dix ans. «Je n’ai pas toujours connu une
enfance très heureuse. Ma mère a dû bosser
dur pour subvenir à nos besoins, mon frère
et moi. Mais tout ce que j’ai vécu m’a rendu
plus forte», affirme la jeune femme de
32 ans.

était atteinte d’un cancer du sein. J’étais très
affectée. J’étais en Angleterre et je voulais
rentrer tout de suite», confie l’habitante
de Triolet.
Revenant sur son rôle au sein de la
Commission des Droits de l’Homme,
elle avoue qu’au début, elle ne
comprenait pas pourquoi elle été
nommée membre d’une division qui
s’occupe des conditions de détention.
C’était en 2014. «Je n’avais jamais visité
une prison auparavant, ni rencontré de
détenu. Mais après, j’ai compris que c’était
presqu’un appel. J’ai appris à connaître
et comprendre l’importance de la dignité
humaine. J’estime que je dois défendre
cette cause jusqu’au bout, peu importe les
conséquen-ces», lance-t-elle.
Être aux côtés de ceux qui souffrent :
une autre des priorités d’Anishta. C’est
à travers l’ONG The Rising qu’elle leur
tend la main, avec le soutien de son
équipe. Pourquoi le social ? «J’ai été
inspirée par ma mère. Elle est présidente
d’une ONG à L’Escalier. Déjà au collège
et à l’université, je m’occupais de plusieurs
clubs. Le social est primordial pour moi.
C’est un moyen de donner de moi-même
aux autres. Je peux servir et je n’attends

Avec son franc-parler et ses
prises de position, la jeune
femme ne s’est pas fait que
des amis ! «Je dis tout le
temps la vérité. Je me bats
pour les causes justes. Je
n’ai pas peur. Je n’ai pas
à plaire aux autres.
Je veux pouvoir vivre
avec une conscience
claire, sans laisser quoi
que ce soit ébranler
mes principes, mes
valeurs morales, mes
convictions et mes idéologies. Il y a des situations
où quelqu’un doit parler ouvertement afin
d’empêcher l’injustice»,
clame-t-elle.

Cette maman d’une fillette qui soufflera bientôt ses deux bougies dit faire
beaucoup d’efforts pour arriver à concilier vie familiale, vie professionnelle et
vie sociale. «Il m’arrive d’être très fatiguée,
mais The Rising m’est aussi précieuse que
mon bébé. Il me semble qu’il n’y a pas beaucoup de différence entre le social et mon travail. J’aime ce que je fais. J’aime vivre pour
les autres».
Elle veut transmettre à sa fille
les valeurs morales, telles
l’honnêteté, le respect
et la courtoisie, afin
de faire d’elle une
citoyenne responsable. Elle lance
aussi un appel à
la population :
«Chaque ère
requiert une révolution.
Nous
devons nous battre contre tout ce qui
met en péril l’avenir de
nos enfants. Et nous ne
devons pas avoir peur des
conséquences. Il faut
se jeter dans
l’arène».

12

13
Allia Syed Hossen-Gooljar

Femme de dialogue
Femme au foyer, Allia Syed Hossen-Gooljar a pourtant un agenda
chargé. Directrice à titre bénévole au Centre des dames mourides, elle
est aussi présidente-adjointe du MACOSS et assistante PRO du Conseil
des religions. Ell siège également au sein de Media Watch Organisation, du Board of Trustees de l’Université du 3e âge, du NGO Trust Fund
Board et du comité du Special Collaborative Programme for Support for
Women and Children in Distress.

P

lus jeune, Allia voulait devenir avocate pour défendre les
femmes qui subissaient de nombreuses injustices. «Beaucoup
étaient incapables de se défendre car elles ne
connaissaient pas leurs droits. La plupart
étaient soumises, car femmes au foyer, et
donc économiquement dépendantes de
leur mari. Quant à celles qui osaient élever
la voix, elles étaient qualifiées de rebelles»,
explique-t-elle.
Manque de bol, Allia Syed HosssenGooljar n’a pas fait des études de droit,
mais détient une licence en études sociales et une maîtrise en développement
social. C’est donc sur le terrain que celle
qui est «une bénévole à plein temps» va
défendre la cause des femmes. Et ce,
depuis 1980.
Ce militantisme social, Allia le tient
de ses parents. «Petite, je voyais maman
être à l’écoute des personnes dans le besoin
qui venaient régulièrement à la maison.
Mon père a été président de la mosquée de
Phoenix pendant une trentaine d’années,
ainsi que conseiller à la mairie de VacoasPhoenix. Il recevait souvent à la maison des
personnes qui avaient des problèmes de nature diverse», dit-elle.
Ses parents ont aussi légué à leurs
enfants un autre bien inestimable : une
grande ouverture d’esprit. «J’ai aussi un
autre centre d’intérêt, qui est le dialogue interreligieux et interculturel. J’ai grandi au
sein d’une famille très ouverte envers des

personnes d’autres religions et cultures. Durant toute mon enfance, j’ai vu des personnes de foi et cultures différentes venir chez
nous. Pour moi, le vivre ensemble n’est pas
un slogan mais une manière de vivre», dit
celle qui détient un Certificate in Peace
and Interfaith Studies.
L’ancienne chargée de cours à temps
partiel, aujourd’hui maman de deux
grands enfants et grand-mère de deux
fillettes, jette néanmoins un regard
triste sur notre monde actuel. «Malheureusement, notre société est de plus en
plus malade. Le progrès a été considérable
sur les plans économique et technologique,
mais sur le plan social c’est le chaos. Il y a
une érosion de valeurs. Plusieurs raisons
expliquent cela. D’abord, notre système
d’éducation a failli dans son rôle de formation. En se concentrant sur les excellences
académiques, le système passe à côté des
valeurs qui doivent être inculquées aux étudiants. Ensuite, certains hommes religieux
ont aussi failli dans leur tâche en mettant
davantage l’accent sur les rites et rituels
que sur les valeurs spirituelles et morales.
Enfin, il y a l’influence des médias qui
échappe au contrôle des parents. Les gens
développent un point de vue déformé des
réalités de vie. Ils deviennent de plus en plus
agressifs car ils n’arrivent pas à gérer leur
colère. Mais, il ne faut pas perdre de vue
qu’il y a aussi beaucoup d’actions positives
sur le terrain mais qui ne sont pas assez
médiatisées», dit-elle.

réjouit des droits acquis par la mauricienne. «Aujourd’hui, elle est présente dans
différentes sphères de la vie active. Plusieurs
femmes ont su se frayer un chemin dans cette société patriarcale et accéder à des postes
de responsabilité autrefois occupés uniquement par les hommes. Je pense à Ameenah
Gurib-Fakim, première présidente de la
République de Maurice, et Maya Hanoomanjee, première femme Speaker de
l’Assemblée nationale. Mais, il ne faut pas
se leurrer. Il y a encore beaucoup de femmes
sur la touche. Il existe toujours des inégalités entre les hommes et les femmes dans le
domaine du travail et de la politique. La
contribution économique des femmes est
sous-évaluée. Pis, elles sont plus touchées
par le chômage, même si elles détiennent
La militante de la cause féminine se plus de diplômes», souligne-t-elle.

14

15
fallait faire beaucoup d’heures
supplémentaires pour pouvoir
toucher Rs 48 par quinzaine.
Après 10 ans passés à l’unité de
production de la branche de Triolet, elle a été transférée à celle
de Terre Rouge.
Mais celle-ci fermera ses
portes dans les années 90.
Michelaine est alors engagée
comme femme laboureur par
Sadhu, un planteur de Triolet.
Elle récoltait des pistaches et
aidait à la récolte de certains
légumes (lalo, aubergines,
calebasses…) dans les
champs. Ce métier, elle l’a exercé pendant une période de
six mois. Puis, à l’arrivée de
la saison de récolte sucrière,
elle est appelée à travailler
dans les champs de canne.
«Je devais couper la canne.
Mais je ne savais comment
faire», explique-t-elle. En
revanche, elle dit connaître
l’entreposage de la paille de
cannes tout au long des fossés.

Michelaine Mathieu

De temps à autre, histoire
de joindre les deux bouts,
Michelaine bosse comme
«aide-maçon» sur des
chantiers de construction.
Mais au bout de quelques
mois, elle délaisse ce métier
de dur labeur pour celui de
femme éboueur.

Affable et joviale, Michelaine
Mathieu, née Ami, est en poste à
Trou aux Biches pour permettre
aux touristes et aux Mauriciens
de profiter d’une plage publique
bien propre.

n’a été scolarisée que jusqu’au Primary
Leaving School Certificate à l’école du
gouvernement du village. Issue d’une
famille modeste de trois enfants, deux
filles et un garçon, elle confie avec regret
qu’elle n’a pas eu le privilège de poursuivre des études secondaires.

À

À 13 ans, sans avoir l’âge de travailler,
elle a intégré une usine de textile comme
ouvrière. «Il fallait se cacher lorsque les
inspecteurs du travail débarquaient»,
confesse-t-elle. À l’époque, c’était un
peu la tendance en zones rurales : à la
À l’usine, Michelaine percevait un
fin du cycle primaire, les filles, vouées au maigre salaire de Rs 8 par semaine. Il lui

Elle fera ses débuts au
sein la compagnie SOS
Nettoyage. Au bout de
cinq ans, Michelaine rejoint Keep Clean, qu’elle
quitte après deux années
pour rejoindre Maxiclean.
Affectée à la plage publique de Mont Choisy
pendant un certain temps, elle est actuellement à celle de Trou aux Biches.

La force tranquille
52 ans, Michelaine Mathieu est
une figure très connue de tous
ceux qui fréquentent la plage
publique de Trou aux Biches.
Née à Pointe aux Piments, Michelaine

mariage, restaient cloîtrées à la maison
ou étaient envoyées à l’usine ou dans les
champs.
Les garçons, eux, étaient favorisés
sur le plan éducatif. S’ils avaient à faire
un choix, les parents, pour la plupart,
préféraient les admettre (au lieu de
leurs filles) au collège en vue d’avoir une
meilleure éducation et obtenir un travail
décent… dans la fonction publique ou
dans le privé.

Travaillant sur un système de shift
(6 à 15 heures ou 10 à 19 heures),
Michelaine Mathieu se dit satisfaite de
son boulot. «Quand je fais le shift de
10 à 19h, je me lève tôt pour préparer le

dîner et effectuer les tâches ménagères»,
déclare-t-elle.
Fervente catholique et férue des cantiques du père Jocelyn Grégoire, Mi-

chelaine ne rate jamais la messe dominicale lorsqu’elle est en congé. Elle aime le
séga, prendre un drink en famille et aller
au bal lorsque l’occasion le permet. Bref,
elle est un bon vivant !

16

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Mila Reekoye

Pas peur des poids lourds
Conductrice d’autobus à la Mauritian Bus Transport, Mila Reekoye
n’a qu’un seul but : décrocher les
permis nécessaires pour pouvoir
conduire gros camions, bulldozers, excavateurs, forklift…

L

a conductrice d’autobus est passionnée par la mécanique. Elle
caresse le rêve de prendre le volant des fourgonnettes transportant les prisonniers ou alors des camions
de sapeurs-pompiers. Et si elle n’y arrive
pas, elle souhaiterait devenir formatrice
au Mauritius Institute of Training and
Development (MITD) pour former
de femmes au métier de conductrice de
poids lourds. «Je veut décrocher le maximum de permis et conduire les bulldozers,
forklifts et excavateurs. Il faut encourager
la femme à intégrer les secteurs d’activité
longtemps occupés par des hommes. C’est
ainsi qu’on arrivera à l’égalité parfaite»,
clame Mila Reekoye.

2002, la jeune femme décide de suivre
des cours de confection de vêtements.
En 2003, elle est embauchée comme
formatrice dans une école à Montagne
Longue. Mais elle quitte ce job au bout
de 10 mois pour devenir vendeuse dans
une boutique à Flic en Flac. En 2004,
après 10 mois passés dans un établissement hôtelier à Calodyne, où elle était
tantôt affectée au mini-club et tantôt à
la réception, elle est retournée travailler
à l’école de Montagne Longue.

Par la suite, Mila Reekoye prend de
l’emploi en tant que Sales Representative dans une entreprise de papeterie
à Sainte-Croix, tout en bossant de
temps à autre pour une compagnie de
catering. Puis, elle obtient un poste de
Dispense Bar-Waitress dans un hôtel à
Grand-Gaube. Nous sommes alors en
2006. Et jusqu’en 2008, elle avait deux
jobs à mi-temps : dans l’entreprise de
papeterie (de 9 heures à 13h30) et à
l’hôtel (15 heures à minuit). «Quitter
ces deux boulots a été un grand sacrifice
À 34 ans, cette célibataire, issue d’une pour moi», confesse Mila Reekoye.
famille de six enfants (4 frères et 2
sœurs), est née à Riche-Terre. Après des
Après un mois à la maison, elle met le
études primaires à l’école Young Men’s, à cap sur l’Australie afin de décrocher
Port-Louis, elle a étudié jusqu’à la Form un diplôme en Hospitality and
V dans la filière comptabilité. N’ayant Management. Partie pour 4 ans,
pu poursuivre sa scolarité, Mila a com- elle était contrainte de retourner
mencé à suivre des cours ; tantôt en au pays après trois mois car les
coiffure, esthétique et application du finances manquaient et son frère
mehendi, tantôt en broderie, peinture était souffrant.
sur toile, art floral et pâtisserie. L’objectif
est tout simple : trouver sa voie.
Le premier job de Mila Reekoye a
été au Centre des femmes de Plaine
des Papayes en 2000. Elle habillait les
nouvelles mariées et appliquait des
motifs de mehendi sur leurs mains.
Ayant soif de connaissances, elle s’est
engagée à suivre des cours de cuisine
indienne et de food preservation. En

De retour à Maurice en 2009, Mila
bosse quelques mois dans un hôtel à
Pointe-aux-Biches. Détentrice d’un
permis de conduire depuis 2003,
elle entame en même temps des
démarches pour décrocher un permis
pour conduire des autobus de 64 places. Et depuis 2010, elle est conductrice
à la Mauritian Bus Transport. «Il faut
être courageuse pour exercer ce métier»,
affirme Mila Reekoye.
En semaine, elle assure trois dessertes (Crève Cœur-Port-Louis, Camp
la Boue-Port-Louis et Eau BouilliePort-Louis). Durant les week-ends, elle
opère sur les lignes de Bois-Marchand,
Baie-du-Tombeau et Cité la Cure. Mais
des fois, en elle travaille aussi comme
receveur.
Héritière d’un terrain de 25 perches,
elle meuble ses temps libres à labourer la
terre. Elle plante des légumes, des fruits
et autres féculents. Férue de musique
bollywoodienne, elle est également
active sur les réseaux sociaux et adore les
sorties entre amis. Comme une jeune
femme de 34 ans !






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